Portraits
Félix Trombe (1906-1985)
Ingénieur de l’Institut de Chimie de Paris et docteur de l’Université de Paris (sur la métallurgie des Terres Rares et les propriétés magnétiques de métaux), Félix Trombe découvre en 1935 le ferromagnétisme du gadolinium, le premier métal magnétique en dehors du groupe du fer. On lui doit, à partir de 1931, la préparation de métaux de terres rares à l’état pur tels que le cérium, le lanthane, le néodyme, le samarium, le gadolinium puis le dysprosium.
Il entre au CNRS et en 1941 et prend la direction du laboratoire des Terres Rares à Meudon dont il sera le directeur jusqu’en 1969, épaulé par Marc Foëx. De 1946 à 1949, Félix Trombe, Marc Foëx et Charlotte Henry La Blanchetais poursuivent des travaux de chimie physique en utilisant l’énergie solaire comme source de hautes températures. Félix Trombe est plus connu pour ses recherches dans le domaine de l’énergie solaire et il est considéré à juste titre comme un pionnier dans ce domaine. En 1949, après avoir démontré à Meudon la possibilité d’atteindre de très hautes températures à l’aide d’un miroir de DCA, pour la fusion de réfractaires, il conçoit à Mont-Louis le four solaire expérimental de 50 kW qui sera implanté dans l’enceinte militaire. Il étudie aussi d’autres possibilités d’utilisation de l’énergie solaire telles que le mur qui porte son nom (breveté en 1956), composé d’un bloc de béton noirci qui accumule le rayonnement solaire le jour et restitue la chaleur pendant la nuit grâce à une circulation naturelle d’air. On lui doit aussi des travaux sur la réfrigération et la climatisation solaire. Félix Trombe a été choisi par le Général De Gaule pour siéger au premier « Conseil des 12 sages » entre 1958 et 1960 qui donne son avis sur la politique scientifique et technique. Convaincu de l’intérêt de l’énergie solaire, il propose en 1958 l’idée de la construction du grand four solaire d’Odeillo de 1000 kW qui débutera en octobre 1961 et s’achèvera en 1969. Selon Félix Trombe, le four solaire d’Odeillo “restera parmi les réalisations audacieuses de notre période moderne”. A la fin du mois de janvier 1969, une étude de la tache focale du four solaire est finalement réalisée et la température maximale dépasse les 3000°C : on peut alors procéder à un premier essai de fusion de plaques d’acier. En 1969, après 25 ans de direction, Félix Trombe quitte le laboratoire des Terres Rares de Meudon pour se consacrer au four solaire d’Odeillo et au Laboratoire de l’Energie Solaire (le LES, qui avait été créé en 1950) qu’il dirigera jusqu’en 1976. Une fois à la retraite, il devient conseiller sur l’énergie solaire et dispense son savoir bien au-delà de nos frontières. Il décède le 26 Mars 1985 en laissant derrière lui près de 300 publications et brevets. Il a reçu de nombreuses distinctions telles que la Croix de guerre 1939-1945, Chevalier en 1947 puis Officier de la Légion d’Honneur en 1961, Commandeur dans l’Ordre des Palmes Académiques, Lauréat de la Société Chimique de France en 1934, de l’Académie des Sciences en 1935 et 1948, de la Société de Géographie en 1946 et de l’Institut de France en 1953. Il a aussi reçu de nombreux prix pour ses travaux sur l’énergie solaire (Société Générale, Ville de Paris, Farrington Daniels de la Solar Energy Society). En 2004, la Société Chimique de France a créé le Prix Félix Trombe qui s’adresse à toute personne ayant réalisé un développement remarquable au service de la chimie.
Sources :
Pierre Teissier, “Fours et maisons solaires de Mont-Louis-Odeillo : Interstices, intersciences et internationalismes de la recherche contemporaine”.
Guy Boistel, Stéphane Le Gars “Dans le champ solaire. Cartographie d’un objet scientifique”, Hermann, pp.181-219, 2015.
Pierre Teissier, Thèse de Doctorat : “L’émergence de la chimie du solide en France (1950-2000). De la formation d’une communauté à sa dispersion”, 12/12/2007, Université Paris X Nanterre.
Paul Caro, Sciences : histoire orale, 2002.
Marc Foex (1910-1983)
Après des études d’ingénieur à l’Institut de chimie de Paris dont il est diplômé en 1932, il obtient en 1936 un doctorat à l’issue d’une thèse préparée au laboratoire des terres rares (en même temps que Félix Trombe avec lequel il travaillera plus tard pendant de nombreuses années) puis, en 1939, un doctorat d’état es-sciences physiques sur l’étude de solubilité et de séparations dans les verres.
Il entre au CNRS en 1939 comme attaché de recherches et étudie alors la trempe des verres ainsi que la conductivité électrique et la chaleur spécifique des métaux des Terres Rares et de leurs alliages. Mis à la disposition du Centre National de la Recherche Scientifique Appliquée (CNRSA), il est affecté en septembre 1939 à l’Institut de chimie, au Laboratoire de chimie minérale où il conduit des études pour la Défense Nationale. A partir de 1941, il poursuit ses travaux à l’Institut de Chimie de Paris au sein du Laboratoire des hautes températures et des Terres Rares dirigé par Félix Trombe. Ses recherches portent notamment sur les oxydes et sels fondus, les verres et les oxydes réfractaires. Il mène des recherches sur la chimie des hautes températures, les Terres Rares et sur les propriétés physico-chimiques des verres. A partir de 1946, il s’intéresse également à l’utilisation du chauffage solaire pour l’obtention de très hautes températures, en collaboration avec Félix Trombe et Charlotte Henry La Blanchetais. Il est nommé Maître de Recherche CNRS en 1948 puis sous-directeur du Laboratoire de l’Energie Solaire (LES) de Mont-Louis en 1952, laboratoire au sein duquel il avait commencé à travailler en 1949 sous la direction de Félix Trombe. Marc Foëx participe aux travaux de la Commission des hautes températures du CNRS ; il devient secrétaire de la Commission des hautes températures et des réfractaires de l’Union Internationale de Chimie Pure et Appliquée (IUPAC) à la fin des années 50. Il donne des cours sur les métaux des Terres Rares à l’École Nationale Supérieure de Chimie. A partir de 1955, avec Félix Trombe, il s’intéresse également à la production de froid à l’aide du rayonnement solaire. Il reçoit la médaille d’argent du CNRS en 1955 et est fait Chevalier dans l’ordre des Palmes Académiques l’année suivante et Chevalier de la Légion d’Honneur en 1957. Il est promu Directeur de Recherche en 1958 puis il intègre le corps des directeurs scientifiques du CNRS en 1960. Il mène des recherches faisant appel à l’utilisation des fours solaires notamment sur la préparation de produits purs, la purification de substances, l’étude des propriétés des matériaux ; il s’intéresse également aux surfaces sélectives utilisables pour le chauffage ou le refroidissement des habitations. En 1964, il est nommé directeur du Laboratoire des ultra-réfractaires (LUR) alors que le centre d’Odeillo est scindé en 2 entités : le LUR et le LES (Laboratoire de l’Energie solaire, dirigé par Félix Trombe, auquel le four solaire de 1000 KW mis en service en 1969 reste rattaché). Marc Foëx décède en 1983, après avoir déposé de nombreux brevets d’invention.
Sources :
Archives de Marc Foëx, directeur du laboratoire des ultraréfractaires au CNRS (1932-1983). Répertoire numérique détaillé du versement 20144762/1-20144762/138, Archives nationales (France) Pierrefitte-sur-Seine 2015;
Ce fonds a fait l’objet d’un versement par la fille de Marc Foëx en 1991 au Secteur archives du CNRS au dépôt de Gif-sur-Yvette pour un tri et un classement en vue d’un versement définitif aux Archives nationales. Il portait la référence interne 920044 LABOS. Ce versement contient les archives de Marc Foëx produites dans le cadre de ses activités de chercheur au CNRS et de directeur du Laboratoire des ultra-réfractaires de 1964 à 1978.